Discours de Trois-Rivières - 24 juillet 1967

De tout mon cœur je remercie Trois-Rivières, sa population si émouvante, son maire si noblement éloquent et son ministre qui se trouve ici à mes côtés. Je remercie M. le Premier ministre de m’y avoir conduit parce que voilà un témoignage vraiment magnifique de ce que nous voulons, et pour cause, appeler le fait français.

Quoi qu’il ait pu arriver, nous sommes maintenant à l’époque où le Québec, le Canada français, devient maître de lui. Il le devient d’ailleurs pacifiquement, il le devient pour son propre bien. Il le devient aussi, je le crois, pour le bien des communautés voisines du Canada tout entier. Il le devient pour l’honneur et par conséquent pour l’avantage de tous les hommes. C’est le génie de notre temps, c’est l’esprit de notre temps que chaque peuple, où qu’il soit et quel qu’il soit, doit disposer de lui-même.

Je suis tout à fait convaincu, et notamment en vous voyant et en vous entendant à Trois-Rivières, que c’est ce qui est en train de se passer ici. Mais le fait que le morceau du peuple français qui est installé dans cette province, dans ce Canada, le fait que ce morceau de notre peuple devient maître de son destin implique pour lui, sans aucun doute, mais aussi pour la France, le vieux pays, de grandes responsabilités.

L’époque actuelle est difficile. C’est une époque de travail, c’est une époque de développement, une époque de progrès qui implique un grand effort du haut en bas, et on ne peut justifier, quand on est un peuple, son existence et son droit, comme vous chantiez tout à l’heure en chantant « O Canada », on ne peut justifier son existence et son droit que si on est en progrès. Or c’est ce que vous êtes, je le vois d’un bout à l’autre du Québec. Vous êtes en train d’accomplir un développement économique, technique, magnifique.

De tout mon cœur, je vous en fais mon compliment. Je vous en fait mon compliment pour vous-mêmes et aussi, je vous le répète, pour la France, laquelle a le devoir, et est résolue à le remplir, a le devoir d’aider le Canada français dans son développement. Elle a déjà commencé à le faire grâce à des accords qui ont été conclus entre votre gouvernement, celui de M. Daniel Johnson, et le gouvernement de la République française, c’est-à-dire le mien. Cela ira en se poursuivant, la France en prend l’engagement devant vous tous et inversement, vous les Français canadiens, au fur et à mesure de votre avènement à tous les égards et sur tous les plans, vous aurez à concourir et en particulier avec vos élites, vos savants, vos ingénieurs, vos cadres, vos artistes, vos techniciens, vous aurez à concourir au progrès du vieux pays, au progrès de la France, et la France l’attend de vous pour demain.

J’emporte de mon passage dans votre belle ville de Trois-Rivières un souvenir inoubliable et croyez bien que partout on l’a vu, on l’a entendu et on a compris ce qui se passe ici en ce moment. Encore une fois, de tout mon cœur, à toutes celles, à tous ceux qui sont venus apporter leur témoignage, merci au nom de la France.

Vive Trois-Rivières!
Vive le Québec!
Vive le Canada français!
Vive la Nouvelle-France!
Et Vive la France!

Source : Jean Tainturier, De Gaulle au Québec. Le dossier des quatre jours, Montréal, Éditions du Jour, 1967.